Le dernier débile s'écrasa à terre en gueulant comme un cochon qu'on égorge. Puis il se releva avec difficulté et me jeta un regard terrifié avant de prendre la fuite. Sérieux... J'ai l'impression d'être un... un... putain, je sais pas, mais un truc genre un monstre qui terrifie les gens... Oh, je suis pas un connard... Et puis, vous ne pouvez vous en prendre qu'à vous-même, aussi. Et à Yukari, mais ça, je vais pas aller le crier sur les toits.

Bref. Plus de Color Gang en vue. Pas de Yukari ni de Shizuo Heiwajima, d'ailleurs. Putain, j'espère qu'elle s'en est tirée... Enfin, il n'y a qu'un seul moyen de le savoir. Yeaaah, let's go ! Je regardai autour de moi, dans l'espoir de retrouver le gosse à qui j'avais filé ma gratte. Et... personne. PUTAIN DE BORDEL DE CHIASSE !! Il est où ce connard de gamin qui s'est tiré avec ma guitare ??! RHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA !! Mais c'est pas possible, on peut pas confier un truc DEUX SECONDES à quelqu'un sans qu'il se tire avec ! Nan mais sérieusement, je suis tombé sur Benjamin là, un morveux aussi... aussi... PUTAAAAAAAAAAIN, je trouve pas le mot, ça m'éneeeeeeeeeeeeeerve-ah voilà, un ENFOIRÉ pareil !! Putain de bordel de merde !! Bon, merde, je fais quoi, je dois aller retrouver Yukari au night-club, mais je peux pas abandonner ma gratte je ne sais où en plein Ikebukuro ! Putain, si ça se trouve il va la vendre, ou l'abîmer, ou la jeter, et je la retrouverai plus jamais... Non, Hakai, arrête de penser à ça, d'abord tu vas trouver Yukari et ensuite tu pars à sa recherche. En la mobilisant, tiens. Et tiens, je vais jouer sur la corde sensible avec Ryuku pour qu'il me file des infos gratos. Non, parce qu'il est hors de question que j'aille chez Orihara et que j'ai pas confiance dans les deux autres filles, là, la naine et la copie de Miku. Surtout en la seconde, c'est bizarre, hein ? Bref. Je vérifiai une dernière fois si ma gratte ne traînait pas dans le coin et me ruai à la sortie du parc, en direction de la boîte des Kawashima. Putain... D'où je cours aussi doucement ?! Putain, je suis pas fatigué, allez, couuuuuuuuuuuuuuuuuuuurs !! Rhaaaaaaaa, putain, j'en ai marre, marre, MARRE, MARRE !! Rhaaaaaaa, ça me tape sur les nerfs, c'est pas possiiiiiiiiible !! Je vais péter un câble, péter un câble, voilà, je vais cogner l'autre là-bas et lui taxer sa bécane, et ensuite je tannerai Ryuku pour qu'il se démerde de trouver son adresse et la ramènerai là-bas. Ouais, c'est une bonne idée, ça. Dois-je préciser le fait que je ne suis jamais monté sur un engin pareil de ma vie ? Je m'avançai vers lui et étais encore à bonne distance quand une autre moto s'arrêta à côté de moi. Putain. Les flics. Je vais me retrouver en taule et tant pis pour ma gueule. Je me retournais touuuuut doucement. Inutile d'aggraver mon cas en me débattant. Sérieusement... C'est quoi déjà l'âge légal pour aller en prison ? Faites que ce soit 18 ans. Pitié. ... D'où je supplie quelqu'un, moi ? ... Bref. Je levai la tête vers le conducteur et... respirai un bon coup. Putain. Quelqu'un m'aime, quelque part.

« Celty », soupirai-je. « Putain, j'ai jamais autant apprécié ta présence. »
La motarde au casque jaune à oreilles de chat ne protégeant rien du tout sortit son portable et tapota dessus.
« Qu'est-ce qu'il t'arrive, encore ? »
Haha, très drôle. Il ne m'arrive rien du tout. Et c'est quoi ce « encore » ? Bref. Faisons-la rapide.
« Bah, j'étais avec Yukari et on a été séparés. Faut que je la retrouve le plus vite possible chez les Kawashima. »
« D'accord, je vois. Mais dis-moi, tu es sûr que ça va ? Tu n'as pas l'air bien. Et puis je crois t'avoir déjà entendu dire que tu ne sortais nulle part sans ta gratte ? »
Je soupirai. Oui, c'est vrai, et son poids familier dans mon dos me manquait.
« C'est justement ça le problème. »
J'allais poursuivre quand elle positionna son écran sous mon nez.
« Tu me raconteras ça sur le chemin. »

Et me voici donc derrière la plus célèbre légende urbaine, à me cramponner à une motarde sans tête sur une moto intégralement noire et sans phares dissimulant un cheval. Yeah. Ou comment ne pas passer inaperçu DU TOUT. Enfin, j’ai pas grand-chose à dire, vu que je me trimballe avec des fringues gothiques et des cheveux bleus. Ha, ha, ha…
Bref, elle me déposa cinq minutes plus tard devant le night-club. Yeah ! Merci Celty. Soudain, je réalisai avec BONHEUR – RHAAAAAAAAAAAA ! – que mon portable, mon porte-monnaie, TOUTES mes affaires utiles et même indispensables se trouvaient DANS mon étui à guitare ! Qui est probablement rendu… Nulle part. J’en sais rien. Putain.

« Hum, Celty, c’est combien pour la course ? », demandai-je, essayant au mieux de cacher ma gêne.
Elle me regarda fixement pendant un temps avant de tapoter à la vitesse de la lumière sur son portable. Sans déconner, comment c’est possible d’écrire aussi vite ? Je sais où se trouvent les touches mais comment elle peut passer de l’une à l’autre comme ça ? ‘Fin c’est Celty aussi, faut pas s’étonner.
« Tu as ton argent ? Il n’est pas dans ta housse ? »

… Ha, ha. Merci, Celty. Mais comment ça se fait que tout le monde connaisse ma vie, comme ça ? Je suis pas particulièrement bavard, surtout sur moi, merde ! D’abord Yukari, maintenant elle ?! Mais… Mais… WHAT THE FUCK ?! … Bref… Elle avait quand même l’air étonnée. … D’où je peux savoir qu’elle est étonnée, moi ? … Je pense que des pancartes avec des expressions faciales ne seraient pas une mauvaise idée. Genre, quand elle est contente, elle en brandit une avec un sourire, etc. Ouais. A voir. ‘Fin je lui en parlerai une autre fois, là il faut juste que j’y aille.

« Ehm, ouais, tu as raison… Je te rembourserai la prochaine fois, d’accord ? »

Elle hocha la tête et me fit comprendre que c’était OK pour cette fois et qu’il ne fallait pas hésiter à la contacter pour de l’aide. Je soupirai. Y a finalement des gens bien dans cet univers. Je lui adressai un signe reconnaissant et entrai dans le club. Fidèle à lui-même, comme toujours. Je jetai un coup d’œil prudent et… yeah, pas d’Alyss Kawashima. C’pas que je peux me la voir, c’est que… non, oubliez. Surtout qu’elle se permet d’en rajouter vu que si je m’énerve sur elle, je perdrais très probablement mon gagne-pain. The Hell. Bref. Je m’assis sur la première chaise venue que je rapprochai de l’entrée. A cette heure, pas de videur. Le premier qui me sort que ça rime, je lui éclate la tête. Et j’attendis. Et attendis. Et attendis. Après trois quarts d’heure d’attente, je ne tenais plus en place. Je demandais à tous ceux que je voyais passer s’ils avaient vu Yukari – sauf à Miku, hein, faut pas pousser, je me contentai donc de lui jeter un regard haineux avant de détourner les yeux. La salle se remplissait petit à petit. Non, pitié, ne me dites pas que je vais devoir me taper un de ses concerts débiles. Enfin, pour le moment, c’était un groupe sans grand intérêt qui lui chauffait bien gentiment la salle. Vous allez me dire, vu l’heure à laquelle on jouait d’habitude, c’était Miku qui nous chauffait notre salle à nous, mais vous voyez, là j’ai pas envie d’y penser et je veux rien lui devoir, donc fermez vos gueules. Une heure d’attente. Pas de Yukari. Je faisais les cent pas dans l’entrée. Et puis finalement, j’entendis une voix familière hors du night-club. Puis sa silhouette se dessina à contre-jour et Yukari Shûzen pénétra dans le bâtiment. Je poussai un long soupir de soulagement. Et puis vis son visage. Du sang coulait de son crâne. J’écarquillai les yeux. Putain. Ils l’avaient pas loupée, ces enfoirés. Elle me vit, me sourit, et comme un con, je me précipitai vers elle, la saisit dans mes bras et la soulevai de terre en la serrant contre moi. Putain. J’ai cru qu’elle était… non, je veux même plus y penser. Et puis je me rendis compte que je devais avoir l’air particulièrement ridicule en cassant un mythe. Je la reposai prestement et regardai autour de nous. Personne ne semblait m’avoir vu. Tant mieux. Je me penchai sur elle.

« Il ne s’est rien passé, OK ? », lâchai-je à mi-voix. « Je t’ai juste fait comprendre que j’étais particulièrement heureux et soulagé de te voir. »
… Et voilà, j’en ai encore trop dit. Elle va trouver le moyen de le retourner contre moi. Oh, pas maintenant, mais elle le fera. Je plantai mes yeux dans les siens.
« Qui t’a fait ça ? », questionnai-je en désignant sa blessure, la colère remontait petit à petit.
… Et voilà², je joue le rôle du grand frère protecteur. Mais… WTF ? Je suis pas son frère, merde, et en plus ce comportement est juste ridiculement débile ! Bref. Soutenant son regard, j’attendis sa réponse.

« Oh, ça ? Rien de bien méchant, ne t’en fais pas. Pour ce qui est de qui m’a fait ça…aucune idée ♪ Il m’a surpris par derrière et m’a frappée. Je crois bien que je me suis évanouie. Mais inutile de t’inquiéter Oni-chan, ça va aller ♪ »

Mais... mais... Dafuq, arrête de m'appeler comme ça ! … Oui, pour ça, faudrait peut-être que j'arrête de me comporter comme un pseudo-grand frère débile et paranoïaque, je sais, merci !
Bref. Genre que c'est rien. T'as pas vu la tête que t'as tirée quand tu t'es massé le front ? … Bah non, elle l'a pas vue, je suis pas un miroir, merci Captain Obvious... Tiens, la preuve, elle tient à peine debout ! Je t'en foutrais, moi, des « c'est rien »...
Soudain, un boucan épouvantable se fit entendre. Mais WTF, la personne qui fait le plus de bruit ici, d'habitude, c'est moi avec ma guitare... et les deux nabots hystériques, là, je sais plus comment ils s'appellent...
Mais merde, c'est le gang de tout à l'heure ! Ils ont été rapides... Et ils ont suivi Yukari, c'est une évidence. FUUUUUU-
Ils restaient à l'entrée. J'allais me poster devant Yukari quand elle prit la parole, me coupant dans mon élan.

« En tous cas, vu la profondeur de la blessure, on m’a frappée, soit avec un tube en fer, soit une batte de base-ball. »

Elle fit un pas en avant et commença à détailler les « voyous » - arrrgh, sérieux, ça fait grand-père sénile de dire ça, en plus je peux très bien être considéré comme tel, VDM – d'ailleurs faudrait peut-être à mettre un peu moins de bleu, on va finir par penser que je fais partie des Blue Squares, VDM² – qui restaient massés à l'entrée comme des... comme des cons, en fait, ahah.

« Crois-tu qu’ils soient assez idiots pour rentrer à l’intérieur ? ♪ »

J'en sais rien... Et vire-moi cette voix joyeuse, putain, c'est pas le moment, tu me fous à moitié les jetons, là...
Coup de feu.
Un type avec une batte rougie et une casquette verte s'effondra. Mort. Probablement. Aucune idée. Veux pas le savoir.
J'étais saisi. Je ne m'attendais pas à ce qu'elle tire. Je faillis m'insurger, puis me ravisai. La situation était complexe. Yukari était blessée, peut-être gravement, ces types nous menaçaient, et... j'avais déjà tué, moi aussi... Je faillis vomir de dégoût à cette idée. Ce producteur avait beau être exécrable, ça ne constituait pas une excuse.

« Ah là là, que dirait les Kawashima s’ils apprenaient qu’une bagarre avait eu lieu dans leur propre Night-Club ? Surtout si vous êtes impliqués… »

… Ils se feraient désintégrer. La fille du patron était terrifiante. En quelques secondes, il ne subsista de l'évènement qu'un corps sans vie. Super. Yukari s'écroula sur le sol, visiblement épuisée.

« Ca… va… j’en ai juste fait un peu trop… Au fait... elle est où... ta guitare ? »

Et merde. C'est moi ou tout Ikebukuro connaît tout de ma vie ? Pff... C'est vrai que l'absence de ma gratte dans mon dos me dérangeait, tant physiquement que mentalement. Je mourais d'envie de partir à sa recherche.
Seulement voilà, dans l'immédiat, il y avait plus important. Je serrai les dents. Cela fait bien plus d'une heure que je l'ai « égarée », maintenant. Qui sait ce qui a pu arriver ? Mon cœur se serra à l'idée que je ne puisse plus jamais la récupérer.
Mon regard se posa sur Yukari. Il fallait faire quelque chose.

Je la pris dans mes bras. Elle était si petite, si fragile... si légère, aussi. Mais elle mange quoi ?! De la salade ?! Mais bouffe de la viande, merde ! Bref... Je calai du mieux que je le pus mes bras sous sa nuque et ses genoux. Elle était à peine consciente. Je sortis prudemment du night-club. La nuit était presque entièrement tombée, les lampadaires allumés. Une douce chaleur estivale régnait dans les rues. J'inspectai rapidement les environs pour vérifier que personne de connu ne pourrait me surprendre – je ne suis pas si connu que ça, faut pas abuser non plus – et, une fois assuré que la voie était libre, je marchai d'un pas rapide en direction de l'hosto du coin. J'y étais allé plusieurs fois, notamment pour rendre visite à Ryuku lors de l'une de ses crises. (Parce que j'étais sévèrement blessé après une bagarre, aussi, mais ça j'évite de le dire. Surtout que c'est ce dingue de Shinra Kishitani qui m'a soigné et que j'en tire un horrible souvenir. Non, je veux pas en parler.) J'y arrivai rapidement et me présentai au service des urgences.

« Ehm, bonjour », marmonnai-je. « Mon amie est blessée et... euh... »
En fait, je ne savais absolument pas comment m'y prendre. A ce moment-là, une infirmière en blouse blanche tourna au coin du couloir et m'aperçut.
« Hakai ! », s'écria-t-elle. « ça fait un bail ! »
Elle s'avança vers moi puis poursuivit avec précipitation :
« Tu vas bien ? Tu es blessé ? Où ça, dis-moi ? Suis-moi, on va te trouver une table d'opération libre, il faut se dépêcher, sinon tu... »
« Elisa... », gémis-je. « Pitié, arrête... Je vais très bien... C'est Yukari qui est dans un sale état. Tu pourrais faire quelque chose pour elle ? »

Non, parce que je sais pas si vous êtes au courant, mais mes compétences en matière de soin sont catastrophiques. Elle opina du chef et nous conduisit dans une chambre libre dans lequel je déposai Yukari. Elle avait dodeliné de la tête sur tout le trajet et marmonné des paroles incompréhensibles. Je résumai très rapidement la situation à Elisa – en omettant le meurtre, je ne voulais pas en parler pour le moment, et de toute façon, l'infirmière n'était pas la bonne personne à qui confier quelque chose dans le genre. Puis elle sortit de la pièce aux draps blancs pour vérifier si elle pouvait rapidement être auscultée voire acceptée au bloc. Désoeuvré, je finis par m'assoir sur une chaise à côté du lit dans le seul but de pouvoir me ronger les sangs. Génial. Je passai un rapide coup de fil à Ryuku, tombai sur son répondeur et lui laissai un message pour lui apprendre l'état de Yukari. On est amis, tous les trois – même s'il ne l'avouera jamais, haha – et c'est normal qu'il le sache. Personnellement, j'aurais détesté qu'on me cache qu'elle était blessée à ce point...
Je raccrochai et l'attente commença. Je n'en pouvais plus. Pitié, Yukari, réveille-toi... J'aurais tant aimé que Shin soit là. Il aurait su quoi faire, lui...

[HRP : Et méga fou rire of the dead en imaginant Hakai en prince et Yukari en princesse 8'D
Alyss, si tu vois ce message, n'oublie pas de prendre des photos, hein ? "8'D]

Soudain, Yukari ouvrit brièvement les yeux avant de les refermer aussitôt. Je me penchai en avant. J'ai rêvé ou... ? Ou quoi ? Ou merde ?
Non, j'ai pas rêvé. Hallelujah ! Elle va bien. Enfin, elle en a l'air. … Oui, maggle. Elle se leva, fit quelques pas hésitants, avant de brusquement sortir son pistolet de sa poche. Je frémis. Je ne voulais pas la juger, je suis plutôt mal placé pour ça, mais la rapidité et la violence de son geste me rappelaient mon propre meurtre. Je suis un monstre de barbarie, je ne veux pas que Yukari le devienne également...
Hey, mais elle m'a même pas calculé, en fait. Elle se laissa tomber sur son lit et soupira longuement. Genre, je te porte sur tout le trajet, je te dégote une chambre, je m'occupe de toi et tout ce que tu trouves à faire, c'est te regarder dans une glace ?! Putain mais la prochaine fois je te plante, et tu te démerdes, et-

« Ha...kai ? »

Toute animosité envolée, je faillis lui rétorquer que non, elle le voyait bien, je m'appelais Kaoru Jeevas. (D'ailleurs, cette fille me fait vaguement flipper, c'est assez bizarre.)

« Tu es là...depuis longtemps ? », reprit-elle.

Ne pas répondre, ou je risque d'être un tantinet irrité.

« Qu'est ce...qui s'est passé ? J'ai..j'ai tué quelqu'un, hein, c'est ça, j'ai tué quelqu'un ?! »

Elle commençait à sérieusement paniquer. Ma colère s'atténua. Il se passait quelque chose d'important, de vraiment grave, on n'avait pas de temps à perdre en broutilles. Elle empoigna mon T-shirt, s'approchant de moi – un peu trop près à mon goût, d'ailleurs, hum... Je ne savais pas quoi répondre. Je ne suis pas doué pour ce genre de situations... Shin, par exemple, il aurait trouvé les mots pour la rassurer – elle ou n'importe qui. Moi, je suis tout juste bon à coller des baffes ; la subtilité, le réconfort, je n'y arrive pas.

« J'ai encore tué, encore ! », poursuivit-elle, terrifiée, serrant mon T-shirt de ses mains crispées. « Je ne me souviens de rien...sauf de ça...un coup de feu et...plus rien... »

J'avais la gorge sèche. J'aurais voulu l'aider, la rassurer, lui expliquer à quel point je savais sa douleur et à quel point je me haïssais pour les mêmes raisons. Je n'y parvenais pas.
Soudain, elle se redressa, me lâcha et se passa la main dans les cheveux avec énergie.

« Il faut que j'me réveilles, allez quoi ! Euh, sinon ça va toi ? »

Merci de t'en soucier... T'as l'air en forme, dis-moi. Ça veut dire que je peux te râler dessus ? Parfait.

« J'veux pas être admise ici moieuh. », bougonnai-je. « ...Dis Hakai, si je dois rester, tu m'aideras à partir ? »

… ALORS LÀ, C'EST LA MEILLEURE.
Mais t'as vu dans quel état tu es ?! T'as failli te faire tuer, tu dois avoir un truc de pété, tu as même TUÉ quelqu'un, et tout ce que tu trouves à faire, c'est agir comme une gamine ?! Mais t'as quoi dans la tête ?! C'est TOTALEMENT HORS DE QUESTION que je te fasse sortir d'ici ! Tu y resteras le temps qu'il faudra, jusqu'à ce que tu sois totalement hors de danger !

« Je tire tellement de mauvais souvenirs de cet endroit que j'ai pas envie de rester une minute de plus là dedans ! ...Tu voudras bien alors ? »

NON.
ET PAS LA PEINE, LE KAWAII, JE SUPPORTE PAS. (Sauf Ryuku mais c'est pas le même problème, ET PUIS IL LE FAIT PAS EXPRÈS POUR SOUTIRER QUELQUE CHOSE, LUI.)
J'allais lui hurler dessus quand Elisa pénétra dans la chambre. PUTAIN. Délivrance. Ou pas, maintenant il s'agit de l'engueuler sans en avoir l'air, donc avoir de la subtilité, ce que je n'ai pas, HELL YEAH. Je me tournai vers elle.

« Elle est réveillée », annonçai-je, essayant tant bien que mal de dissimuler mon irritation. « Je pense qu'elle devrait au moins être vue par un médecin, non ? On sait jamais, ça pourrait être grave. »

Elle acquiesça et s'en alla après s'être enquit de l'état de Yukari qui lui répondit que tout allait bien. Bref.

« Yukari, je crois que tu te rends pas vraiment compte de la situation », explosai-je une fois Elisa sortie. « On est pas dans un manga, je vais pas t'aider à t'échapper d'ici en vertu de notre amitié. Je t'aime beaucoup, mais je vais pas te passer tous tes caprices non plus. T'es plus une enfant, maintenant, il faut que tu fasses un minimum attention à ce que tu fais et aux conséquences que ça peut avoir sur les autres et surtout sur toi. Donc non, je ne vais pas te prendre sur mon dos et courir à travers les couloirs jusqu'à la sortie de secours. »

Je faillis poursuivre, mais je me contins. Si je continuais, j'allais littéralement hurler de rage et de frustration. Yukari, est-ce que tu te rends compte, un peu, de ce que ça me cause à moi d'entendre ça ?! De voir que tu fais si peu cas de ton propre état ?! Tout ce qui compte, c'est ton petit confort personnel, mais un confort stupide, mal placé ! Alors range-moi cette foutue fierté qui te pousse à vouloir te tirer dans ta poche avec ton mouchoir dessus !

[HRP : La rébellion de Hakai face à sa ohime-sama ""8D *sort*
Après relecture... MY GOSH, Elly, sors de ce corps DDD8]

« Bon, je resterais là, à attendre qu'un ange frappe à ma porte pour me soigner alors. Et non, je te promets que je ne partirais pas. Vu que tu me connais par cœur, je préfère te le dire. »

Je me détendis. C'est bon, elle ne risquait plus de faire l'une des plus grosses conneries de sa vie. J'eus un petit sourire et soupirai, relâché. .. EH MAIS DAFUUUUUUUUUUUQ ?! D'où tu me tripotes les joues comme ça ? Mais lâche-moi, bordel, VIRE TES MAINS DE LA ! Oh god, why...

« Alleeeeeeeez, fait pas cette tête, je te promets que je resterais ici. Puis tu pourras toujours demander à cette fille si j'ai pas fugué, vu que vous avez l'air de vous connaître ♪ J'avoue même que j'suis un peu jalouse ! »

Jalouse... ? Euh, je dois le prendre comment là ?! Non, ça arrive souvent que les gens se fassent des films sur Elisa et moi, mais c'est totalement faux ! Je l'apprécie beaucoup, c'est une fille super, qui m'a aidé et m'a fait rentrer à Broken Flower. C'est grâce à elle que j'ai pu rencontrer Yukari, Ryuku et Shin. Mais entendre Yukari dire qu'elle est jalouse d'elle, c'est franchement... BIZARRE comme situation. Merde, en plus, je croyais qu'elle était au courant pour Shin... PUTAIN, et Ryuku ??! Merde merde merde, changer de sujet, vite !!

« Et puis si tu veux vraiment t'assurer que je ne me suis pas enfuie, t'auras qu'à passer me voir avec Ryuku ! », s'écria-t-elle joyeusement. « Enfin, si tu as envie bien sûr ! »

Ses paroles douchèrent ma panique naissante. Je lui ébouriffai les cheveux et lui chatouillai les côtes.

« Ooooooh, mais avec joie ! Tiens, on se ramènera même avec des pocky ! Oh mais ma pauvre, dans ton état, tu ne pourras sûrement pas en prendre ! Quel dommage ! »

Je ricanai bêtement. Avec tous ces évènements, je m'étais tellement rongé les sangs que j'avais presque oublié comment rire.

« Okay, je ferais tout pour me rétablir le plus vite possible pour manger des pockys ! Et pour continuer à vous câliner ♪ »

Ouais, ouais, c'est ça, compte là-dessus.

« En tous cas, j'ai hâte que vous me rendiez visite ! Je ferais exprès de ne rien manger pour les pockys ♪ »

... WHAAAAAAAAAAAAAAAAT ?! J'ai bien entendu ?! Nan mais ça va pas, ça sert à rien que je te gueule dessus, faut que je te cogne aussi ?!

« Alors, ta guitare, tu l'as perdue ou quoi ? »

Je me figeai. Putain, je l'avais oubliée. Je l'avais oubliée. Ma gratte. Que j'ai réussi à paumer. J'avais oublié que j'avais paumé ma gratte. J'ai réussi à paumer ma gratte et j'ai réussi à oublier que je l'avais paumée. Non, peu importe le sens dans lequel je tourne la phrase, ça sonne toujours aussi mal. PUTAAAAAAAAAAAAAAAAAAAIN !!

« Nan, sérieux...tu l'as paumé ? »

Je crois que j'étais blanc comme un linge. Comment je vais faire pour la retrouver ?? Ryuku pourrait m'aider, il comprendrait facilement à quel point ça m'affecte. Mais s'il n'y parvient pas ? Et si jamais elle demeurait introuvable, et que je ne la revoyais jamais ?!

« Ah là là, j'me demande vraiment comment t'as fait... Au pire, t'as qu'à aller demander à Izaya, il me doit un petit service, tu n'auras qu'à lui dire que c'est de ma part ♪ »

Je bondis en arrière, soudainement alerte.

« Plutôt crever ! Je suis pas suicidaire, merci bien, d'ailleurs tu sais parfaitement ce que je pense de tes magouilles avec lui ! Non, je vais demander à Ryuku, et probablement à Shin et Dimitri. Quoique, Shin, je sais pas. J'ai tellement honte... C'est lui qui me l'a offerte... »

Je baissai les yeux. Yukari n'ignorait rien de ma relation avec Shin. Enfin, je crois. Euh... Non, j'en sais rien en fait. Je lui en ai jamais parlé mais je pensais qu'elle serait suffisamment perspicace pour le deviner. Sauf que ses paroles de tout à l'heure me font douter. Euh, non, mieux vaut ne pas en parler pour le moment.

« Bon. Je vais te laisser, il faut que je me dépêche si je veux la retrouver un jour. Je te tiens au courant », ajoutai-je en souriant. « A demain, Yukari ! »

Je lui ébouriffai les cheveux encore une fois et ouvris la porte avant de me retourner.

« Au fait, tu veux que je te ramène un truc ? Du style tes affaires à dessin, des mangas, ou autre chose ? »

« Owaaaaay, mes affaires de dessins et les mangas que tu verras éparpillé sur mon lit, s'il te plaît ♪ »

Quand on y pense, je ne lis jamais de mangas. C'est pas que j'aime pas, mais... je sais pas, j'y pense pas. J'opinai du chef et me retournai pour m'en aller quand un poids s'abattit brusquement sur mes épaules. Hey mais... Mais ça fait mal, merde ! Elle est tarée ou quoi ?!

« HAKAAAAAAAI ! », beugla-t-elle à mes oreilles.

Oui, c'est moi. Ça fait un peu bizarre sur les bords. Du style « DÉTRUIRE ! TOUT DÉTRUIRE ! », suivi d'un rire de badass. Ouais, c'est carrément flippant. J'ai vraiment un prénom de merde... Et des amis de merde, aussi. Bordel, Yukari, mais arrête de me tirer les joues dans tous les sens, c'est pas possible ça ! Cette fille n'est pas normale.

« T'es méchant Hakai, pourquoi tu m'as pas dit que t'étais amoureux de Shin ? Et le connaissant, j'suis sûre que vous êtes ensemble ♪ Ah, l'amour c'est trop mignon ! J'suis contente pour vous deux, mais j'suis pas contente que tu m'ais rien diiiiiiieuh ! Tu veux quand même pas que j'en parle à Ryuku ou Izaya, si ? ♪ »

Je m'étouffai. De quoi ?! J'ai bien entendu ?! JE TE JURE QUE SI T'EN PARLES A CE CONNARD D'ORIHARA, ÇA IRA MAL. Et puis comme si j'allais en parler comme ça, à n'importe qui... Oui, parfaitement, Yukari, c'est n'importe qui. Elle est capable de revendre l'information ou de la laisser échapper par mégarde. Et puis... merde ! J'ai encore le droit de dire ce que je veux à qui je veux ! A ton avis, y a combien de personnes qui sont au courant ?! Bah... Déjà, y a Ryuku, il l'a capté très vite. Y a Shin, évidemment. Et Kaoru, aussi. Quoique... ça me paraît bizarre. Soit elle le sait pas, parce qu'elle l'a pas remarqué – m'enfin ça m'étonnerait, elle est flippante mais pas débile non plus – et que Shin ne le lui a pas dit – ça aussi c'est improbable, ils ont une connexion télépathique, c'est pas possible autrement – soit elle le sait et elle me stalke en toute connaissance de cause. Putain.
Et puis Ace, peut-être. Non, je pense pas. Il est pas du genre à l'avoir remarqué et je pense pas que Shin le lui ai dit. Enfin... Eux aussi ont une liaison télépathique. Donc je sais pas. Et c'est tout, non ? Dimitri est trop blasé pour l'avoir remarqué. Et j'ai pas d'autres amis, hell yeah.
…
Je suis tombé assez bas pour essayer de deviner qui sait que j'aime Shin. Laissez-moi me pendre...
Enfin bref. Je me laissai tomber en arrière, comprimant Yukari entre mon corps et le lit. … NON, IL N'Y A RIEN DE TORDU DANS CETTE SCÈNE, MERCI. C'est juste par esprit de vengeance.

« Je te l'ai pas dit parce que... Parce que... J'en sais rien. Parce que Ryuku le savait et que ça lui faisait un moyen de pression sur moi. »

Et moi j'en ai un beau, de moyen de pression sur lui, muhaha. Ehm, non, oubliez le rire pseudo-machiavélique.

« Et puis parce que c'est compliqué », poursuivis-je. « On a tous les deux pas mal d'ennemis, à Ikebukuro, et on veut pas trop leur laisser voir nos points faibles. »

Excuse de meeeeeeeeerde ~♪ La seule raison pour laquelle j'en parle pas, c'est que ça me gêne. C'est con hein ? Je fais 1m93, je pèse 80 kilos, je fais peur à la moitié de la ville, et ça me gêne d'avouer publiquement que j'aime quelqu'un. Que j'aime un homme. Oui, je suis complexé par mon homosexualité. Ça vous pose un problème ?
Je me levai, libérant Yukari avant qu'elle ne meure asphyxiée.

« Enfin bref. J'y vais. Je te ramène tout ça demain matin. Si jamais j'ai un problème – on sait jamais – je te les fais passer par Elisa, OK ? »

Je lui ébouriffai mollement les cheveux en guise d'adieu. J'étais fatigué, las, et en pleine overdose d'inquiétude et de honte. Comment je vais bien pouvoir lui expliquer ça ? Il va me détester. Il ne va jamais me pardonner et refusera de me voir. Et moi, je vais finir dans un caniveau, seul, triste, abandonné. Je passai la porte avec lenteur, sortis de la chambre, et rentrai à pied, dans l'obscurité de la nuit tombée. Ne croisant personne, je marchai lentement, mains dans les poches, perdu dans mes sombres pensées. J'arrivai au lycée. Fermé. Pas de réceptionniste à cette heure, tu parles. Je poussai un grognement et escaladai le mur avant de gagner les dortoirs le plus discrètement possible – je vous ai déjà dit que je mesure plus d'1m90 ? Fuck my life. Je pénétrai finalement dans ma chambre et m'effondrai lamentablement sur mon lit. Ma vie, c'est de la merde, et je vous emmerde.

[HRP : Fin 8D
Suite au prochain épisode : le mariage 8D *meurt*]